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Schemas d'investissement en mutation : 5 tendances majeures de l'IDE et leur impact sur le developpement

23 avril 2024

Des facteurs autres que les déterminants économiques influencent de plus en plus les décisions d'investissement, laissant de côté les économies plus petites et entravant le développement basé sur l'IDE.

Un nouveau rapport d’ONU commerce et développement (CNUCED) met en lumière les principales évolutions de l'investissement étranger direct (IED) mondial, redessinées par les tendances sur les chaînes de valeur mondiales, les avancées technologiques, la géopolitique et les préoccupations environnementales.

Intitulé « Fracture économique mondiale et évolution des schémas d'investissemen » (disponible en anglais), le rapport met en garde contre le fait que des facteurs autres que les déterminants économiques influencent de plus en plus les décisions d'investissement, compliquant les approches traditionnelles pour la promotion de l'investissement et entravant le développement basé sur l'IDE.

Cinq graphiques illustrent l'impact de ces changements sur le développement.

L'IDE peine à suivre le rythme du PIB et du commerce

La croissance de l'IDE et des chaînes de valeur mondiales (CVM) n'est plus alignée sur la croissance du PIB et du commerce, indiquant un changement significatif dans l'économie mondiale.

Depuis 2010, le PIB mondial et le commerce ont augmenté en moyenne de 3,4 % et de 4,2 % par an, même dans un contexte de tensions commerciales croissantes. Dans le même temps, la croissance de l'IDE a stagné à un niveau proche de zéro.

Ce décalage reflète la prudence accrue des investisseurs en raison de l'évolution de la production internationale et des chaînes de valeur mondiales, de la montée du protectionnisme et de l'aggravation des tensions géopolitiques.

Il souligne également que les pays en développement dont le développement économique dépend des investissements directs étrangers sont particulièrement vulnérables aux variations de flux d'investissement.

De l'industrie manufacturière aux services

Les IDE privilégient de plus en plus les services au détriment de l'industrie manufacturière, creusant ainsi l'écart entre les deux secteurs.

Entre 2004 et 2023, la part des nouveaux projets transfrontaliers dans le secteur des services est passée de 66 % à 81 %. Simultanément, les investissements dans les services au sein des industries manufacturières ont presque doublé pour atteindre environ 70 %, sous l'effet des progrès technologiques rapides.

En revanche, l'IDE vers l'industrie manufacturière a stagné pendant deux décennies avant de connaître un ralentissement significatif, avec un taux de croissance annuel composé négatif de -12 % au cours des trois années qui ont suivi l'épidémie de COVID-19.

L'expansion du secteur des services profite principalement aux grandes économies en développement qui peuvent être compétitives, créant un déséquilibre qui désavantage les plus petites. En outre, la diminution des flux d'IDE vers le secteur manufacturier entrave gravement la capacité des économies moins développées à moderniser leurs méthodes de production et à adopter de nouvelles technologies.

Les tensions géopolitiques affectent de plus en plus les flux d'IDE

Les récents conflits et crises mondiaux ont perturbé les schémas d'investissement habituels, entraînant des relations d'investissement instables et limitant les chances de bénéficier d'une diversification stratégique.

Les investissements entre pays géopolitiquement éloignés - ceux qui ont des intérêts politiques ou des politiques étrangères divergents - ont diminué de 23 % en 2013 à 13 % en 2022.

Cette tendance est devenue particulièrement prononcée dans l'industrie manufacturière lorsque les tensions commerciales ont commencé à s'intensifier en 2019.

Hausse en flèche des investissements vers les technologies environnementales

Alors que les préoccupations liées au changement climatique s'intensifient, les IDE dans les technologies environnementales telles que l'énergie éolienne et solaire se sont révélés être le secteur à la croissance la plus rapide en dehors des services.

Leur part dans le total des nouveaux projets dans les secteurs autres que les services est passée de 1 % à 20 % au cours des deux dernières décennies. De même, les projets d'IDE dans la fabrication de véhicules électriques et de batteries ont augmenté de 27 % par an depuis 2016.

Au-delà du secteur de l'énergie verte, d'autres technologies environnementales - de la production d'hydrogène aux carburants aéronautiques durables et aux emballages écologiques - devraient offrir aux pays de nouvelles possibilités d'attirer des investissements et de développer de nouvelles industries.

Toutefois, l'augmentation des investissements directs étrangers dans les technologies environnementales ne compense que partiellement la baisse des investissements dans d'autres secteurs manufacturiers. En outre, l'accent mis sur les secteurs de haute technologie profite principalement aux économies développées, tandis que les économies plus petites et moins développées continuent de lutter contre la diminution des IDE dans les secteurs traditionnels.

Marginalisation accrue des pays moins développés

Les flux d'investissement mondiaux privilégient de plus en plus les secteurs des pays développés et des principaux marchés émergents. Cette orientation étroite tend à exclure les pays plus petits et moins développés, ce qui aggrave leur vulnérabilité économique.

La part des projets d'IDE dans les pays les moins avancés (PMA) est passée de 3 % au milieu des années 2010 à seulement 1 %. En outre, l'IDE dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire de la tranche inférieure a diminué d'un tiers au cours des deux dernières décennies.

Le rétrécissement du champ d'action des IDE, tant sur le plan géographique que sectoriel, met à l'écart les pays les plus petits et les moins développés, ce qui accroît leur fragilité économique et compromet leurs aspirations à une croissance et à un développement économique soutenus.

Principales recommandations

L’ONU Commerce et Développement appelle à une action immédiate pour garantir que les bénéfices de l'investissement soient distribués plus équitablement et soient alignés sur des objectifs de développement primordiaux.

Pour les institutions mondiales

  • Fournir un soutien financier et stratégique aux pays en développement, en particulier aux PMA, afin qu'ils revoient leurs stratégies de développement basées sur l'IDE et les chaînes de valeur mondiales et qu'ils renforcent leur attrait pour les investisseurs étrangers.
  • Renforcer la coopération internationale pour gérer les risques géopolitiques, apaiser les tensions et garantir un climat d'investissement stable et ouvert.

Pour les gouvernements des pays en développement

  • Revoir leurs stratégies de développement économique. Le secteur manufacturier ne garantit plus une croissance ni un développement économique durables.
  • Consolider les liens avec les pays voisins et coopérer au niveau régional pour renforcer les chaînes de valeur régionales.
  • Promouvoir les investissements dans les technologies durables et vertes ainsi que dans d'autres secteurs motivés par des objectifs de durabilité et des considérations politiques.