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UNCTAD eCommerce Week 2022: Session intitulée Crise de la Covid-19 et fracture numérique dans l'espace francophone

Statement by Isabelle Durant, Deputy Secretary-General of UNCTAD

UNCTAD eCommerce Week 2022: Session intitulée Crise de la Covid-19 et fracture numérique dans l'espace francophone

Geneva
26 April 2022

Renforcer l'inclusion et la souveraineté numérique pour une plus grande résilience, organisée par l'OIF

Excellences,

Mesdames, Messieurs,

Chers participants,

J’ai le grand plaisir de contribuer à cette session « Crise de la COVID-19 et fracture numérique dans l’espace francophone : Renforcer l’inclusion et la souveraineté numérique pour une plus grande résilience », autour de la publication que l’OIF présente aujourd’hui.

Les conclusions de cette étude font écho à certains travaux de la CNUCED sur les questions liées au commerce électronique et à l’économie numérique, ainsi qu’aux résultats des études récentes que nous avons conduites sur les impacts de la pandémie.

J’aimerais attirer l’attention sur quelques points-clé de ce rapport :

L’accès aux TIC constitue un levier puissant de développement mais la fracture numérique persiste de façon préoccupante.

  • Si l'économie numérique évolue rapidement, elle le fait sur fond d'énormes fractures et déséquilibres dans l'économie mondiale. La moitié de la population mondiale reste encore hors ligne et dans les pays les moins avancés (PMA), qui représentent plus de 40% des membres de l’OIF, seule une personne sur quatre (27%) utilise l'internet. Au sein des PMA la population urbaine est quatre fois plus susceptible d’utiliser l’Internet que dans la population rurale (47% Vs 13%). En outre, le débit moyen du haut débit fixe est environ huit fois plus élevé dans les pays développés que dans les PMA, tandis que celui du haut débit mobile est environ trois fois plus élevé. Si dans les pays développés, l’écart homme-femmes dans l’utilisation de l’Internet n’est presque plus existant, il demeure important parmi les PMA, où à peu près une femme sur cinq utilise l’Internet contre un homme sur trois.
     
  • Tout comme la CNUCED, le rapport de l’OIF mentionne très explicitement que l’accès aux TIC n’est pas qu’une question de connectivité. La fracture numérique et le faible usage des outils numériques est aussi grandement lié la compréhension du modèle économique du numérique, de son fonctionnement, de ses ressorts et leviers que sont les données et la plateformisation, ainsi que des compétences qu’un tel « business model » requiert pour qu’il devienne vecteur de prospérité et de valeur économique pour le développement.
     
  • Le Rapport sur l'économie numérique 2021 de la CNUCED met en exergue un autre volet de la fracture numérique : celle des données. Les données numériques jouent un rôle de plus en plus important en tant que ressource économique et stratégique, une tendance renforcée par la pandémie. Deux pays - les États-Unis et la Chine - font figure de pionniers dans ce domaine, tandis que la plupart des autres pays sont nettement désavantagés. Alors que les États-Unis et la Chine dominent l'exploitation et le traitement des données ainsi que la capitalisation du marché des plus grandes plateformes numériques mondiales, la plupart des pays en développement sont quant à eux de simples fournisseurs de données brutes aux plateformes numériques mondiales, tout en devant payer pour l'intelligence numérique générée à partir de leurs données. À la fracture numérique classique, liée à la connectivité, s'ajoute ce que l'on peut appeler une "fracture des données".
     
  • À l'approche de l'échéance de l'agenda 2030 pour le développement durable, il est essentiel de travailler à réduire cette double fracture (c.-à-d. la fracture dans l’accès aux TIC et la fracture des données). Nous reconnaissons le rôle crucial de la coopération internationale dans le domaine du numérique pour accélérer les progrès vers les ODD. Nous collaborons avec divers partenaires internationaux, donateurs et communautés pour garantir que le développement tire profit de la numérisation. Aussi, à travers notre initiative eTrade for all nous aidons les pays en développement à renforcer leurs capacités et à tirer parti de l’économie numérique. A cet effet, nous avons mené des évaluations de l’état de préparation au commerce électronique (eT Readies) dans 12 pays membres de l’OIF, dont 9 sont des PMA[1]. Ces évaluations fournissent des recommandations ciblées pour chaque pays dans sept domaines clés pour développer des écosystèmes numériques inclusifs. Le programme eTrade for Women vise quant à lui à stimuler l'entrepreneuriat numérique féminin dans les pays en développement. Des partenariats intelligents sont essentiels pour mettre en œuvre ces recommandations et réduire les différentes dimensions de la fracture numérique, qui va au-delà de la simple connectivité.  

L’accès aux TIC a été un élément central de la résilience des économies au choc sanitaire et économique provoqué par la COVID-19 mais la pandémie a eu des conséquences durables sur les entreprises, et notamment les PMEs .

  • Deux ans se sont écoulés depuis le début de la pandémie de COVID-19. Alors que les retombées économiques se font encore sentir partout dans le monde, ses impacts ne sont pas entièrement saisis. En particulier, l'accélération de la transformation digitale, avec des solutions digitales développées pour faciliter la vie économique et les activités sociales à distance, s'est accompagnée d'une montée en puissance du commerce électronique. Les recherches de la CNUCED ont montré que la pandémie a révélé les lacunes dans l’état de préparation dans le domaine du numérique, surtout dans les économies les plus vulnérables telles que les PMA. Selon une enquête que nous avons menée auprès des entreprises dans 23 pays, il est ressorti que la réduction des coûts d’accès à l’Internet doit constituer une priorité majeure pour soutenir une relance post-pandémie, faisant du numérique un levier de développement. En outre, les entreprises ont également souligné l’importance d’avoir des stratégies nationales pour le développement du commerce électronique, qui favorisent une plus grande coordination des efforts entre les secteurs public et privé. Nous sommes ravis d’appuyer les efforts des pays dans ce sens, notamment au Bénin, au Rwanda, ainsi que dans les états membres de la CEDEAO, où nous apportons un appui pour le développement de stratégies nationales et régionales pour le développement du commerce électronique, aidant ainsi à renforcer les capacités dans plusieurs pays membre de l’OIF.
     
  • La relance inclusive est précisément l'objectif de la CNUCED pour les années à venir, comme l'a confirmé sa dernière réunion ministérielle. Le Pacte de Bridgetown donne à la CNUCED le mandat d’œuvrer pour « un monde plus résilient, numérique et inclusif de prospérité partagée [en] transformant les économies par la diversification ; en favorisant une économie plus durable et plus résiliente ; en améliorant le mode de financement du développement ; et en revitalisant le multilatéralisme". Vous remarquerez que le mot "numérique" est au premier plan.

Un écosystème numérique et souverain, qui promeut l’autonomie et la durabilité des écosystèmes numériques en matière de production, collecte, stockage, diffusion, exploitation et valorisation de l’information numérisée, au bénéfice de l’ensemble de la population est préconisé.

  • Le Rapport sur l'économie numérique 2021 de la CNUCED souligne l’importance pour les pays en développement d’acquérir des compétences en matière de TIC, de créer un environnement favorable au commerce électronique et à l'économie numérique, d’investir pour participer à un marché numérique mondial et de prendre part à la gouvernance numérique.
     
  • L'exploitation des données numériques au profit de tous les peuples et de la planète est au cœur de ces enjeux. Elle nécessitera une nouvelle réflexion et des approches novatrices en matière de gouvernance. Le rapport note qu'une nouvelle approche sous l’impulsion des Nations Unies devrait encourager le partage des données à l'échelle mondiale, pour des bénéfices économiques accrus pour les pays en développement, tout en renforçant la confiance dans l'économie numérique. Une nouvelle gouvernance numérique devrait permettre d'éviter une plus grande fragmentation de l'internet, de relever les défis politiques découlant des positions dominantes des plateformes numériques et de réduire les inégalités existantes.
     
  • Les Nations unies offrent la plateforme naturelle pour faire avancer ce programme aux multiples facettes avec la participation de toutes les parties concernées.
     
  • Nous appelons nos partenaires et la communauté internationale à soutenir ces efforts pour un monde numérique plus équitable et inclusif.
     

[1] Bénin, Burkina Faso, Cambodge, Côte d’Ivoire, Mali, Madagascar, Niger, RDP Lao, Sénégal, Togo, Tunisie, Vanuatu (en gras les non-PMA)