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UNCTAD side event at the 66th session of UN Commission on the Status of Women - Accelerating progress in trade and gender: New policy and data developments

Statement by Isabelle Durant, Deputy Secretary-General of UNCTAD

UNCTAD side event at the 66th session of UN Commission on the Status of Women - Accelerating progress in trade and gender: New policy and data developments

Online
17 March 2022

Chers panélistes,

Mesdames et Messieurs les délégués,

Mesdames et Messieurs,

 

Pendant longtemps, trop longtemps, le commerce a été considéré comme neutre du point de vue du genre et le lien entre commerce et genre n'était pas considéré comme un sujet de discussion dans les forums commerciaux. C'était une erreur, et heureusement, les choses ont changé.

Le fait que la communauté commerciale aborde les questions d'égalité des sexes et d'autonomisation économique des femmes dans son discours et ses délibérations, y compris au sein de l'OMC, est une évolution positive. Elle permet de mieux comprendre la dimension de genre du commerce et de concevoir des politiques commerciales dont les résultats sont plus inclusifs et équitables dans la distribution des bénéfices du commerce international.

Ce qui importe, c'est que les politiques et instruments commerciaux tiennent compte de la dimension de genre dès le départ, ex ante. Le genre ne peut pas être une réflexion après coup, ex-post.

On perçoit des signes encourageants dans l'élaboration des politiques commerciales, à savoir de la visibilité et de la reconnaissance des aspects de genre. Le nombre d'accords commerciaux bilatéraux et régionaux qui font explicitement référence au genre a augmenté au cours de la dernière décennie. L'accord de libre-échange de 2016 entre le Chili et l'Uruguay a été le premier accord de libre-échange à inclure un chapitre sur le genre. Désormais, un total de 83 accords commerciaux régionaux et bilatéraux comprend au moins une disposition mentionnant explicitement le genre ou les femmes. Dans le cadre du processus de négociation de la phase II de la zone de libre-échange continentale africaine, un protocole sur les femmes dans le commerce sera élaboré afin de soutenir la participation pleine et égale des femmes à l'intégration commerciale continentale. Cependant, il reste à voir quelle attention sera accordée à sa mise en œuvre et à l’évaluation des effets concrets de ces dispositions au regard des dispositions chiffrées et détaillées par secteur dans le reste des accords.

Les politiques commerciales inclusives sont également un moyen important de favoriser une égalité des sexes plus générale et de soutenir une plus grande autonomie économique des femmes. Mais il reste encore beaucoup à faire. Selon le Forum économique mondial, à politique inchangée, il faudra 136 ans pour combler le fossé mondial entre les sexes. Il est hors de question d’attendre si longtemps.

La CNUCED contribue à combler ces écarts. Elle aide ses pays membres à rendre leurs politiques économiques, notamment commerciales, plus sensibles aux questions de genre. Nous proposons des analyses, des cours en ligne et toute une série d'activités de renforcement des capacités, telles qu'un soutien sur mesure aux femmes porteuses de micro et petites entreprises qui opèrent dans les zones frontalières ou qui se lancent dans le commerce électronique.

Et surtout, nous voulons fournir de meilleures données pour éclairer l'élaboration des politiques.

Jusqu'à présent, les données n'ont pas été systématiquement collectées et produites sur la manière dont les femmes et les hommes participent au commerce international et dont le commerce les affecte.

Cela ne permet pas l'élaboration de politiques fondées sur des données probantes et peut conduire à des mesures politiques malencontreuses ou à des impacts négatifs involontaires. Parfois, le manque de données peut même être un moyen utile de bloquer toute évolution, de nier ce qui ne peut être prouvé et d’empêcher tout débat sur les mesures à prendre.  

Nous devons donc investir dans les données sur le genre dans le commerce pour informer les décideurs, les parlementaires et toute une série d'acteurs de la société civile et du secteur privé.

Le problème est qu'il n'existe pas de variable directe liée au sexe dans les statistiques du commerce international. Mais il existe d'autres moyens. Depuis 2018, un projet mené par la CNUCED aide les pays à relier les données statistiques nationales pour évaluer le genre dans le commerce. Il utilise et combine les données existantes recueillies par les autorités statistiques sur le commerce international, l'égalité des sexes dans l'éducation, l'accès aux ressources productives, la participation des femmes et des hommes à l'économie et à la main-d'œuvre, ainsi que leurs emplois, leurs revenus et leurs rôles dans la société. Lier les données existantes est une alternative rentable et durable au développement de nouvelles enquêtes ponctuelles.

Et les données sur le genre et le commerce peuvent faire la différence. Permettez-moi de vous donner quelques exemples.

Grâce à nos recherches, nous savons que, par exemple en Géorgie, une meilleure égalité des sexes dans la propriété et la gestion des entreprises peut contribuer à l'émancipation économique des femmes, car les entreprises commerciales détenues par des femmes emploient plus de femmes et offrent un écart salarial moins important entre les sexes. Des données similaires sont disponibles pour la Finlande.

Les statistiques de genre dans le commerce peuvent également aider à analyser l'impact sexué de COVID-19. Par exemple, les données de la Géorgie révèlent également que l'emploi des femmes dans les entreprises exportatrices et importatrices a davantage diminué que celui des hommes en 2020 par rapport à 2019. En outre, les entreprises détenues par des femmes ont subi des pertes d'emploi plus sévères. De telles données seront également bientôt disponibles pour le Cameroun, le Kenya, le Sénégal et le Zimbabwe.

De meilleures capacités et données statistiques peuvent alimenter des outils analytiques de politique commerciale, tels que la boîte à outils de la CNUCED sur le commerce et le genre. Cette boîte à outils offre un cadre pour les évaluations ex ante de l'impact des réformes commerciales sur les femmes. Elle a été utilisée pour évaluer comment l'accord de partenariat économique entre l'UE et la Communauté d'Afrique de l'Est affecterait les femmes kenyanes. L'UE l'a également utilisé dans son évaluation de l'impact sur le développement durable de l'accord d'association UE-Chili.

Il est certain que les données ne sont pas la panacée car avant tout, pour promouvoir l’égalité des genres,  il faut une volonté politique, un réel engagement, des projets concrets et des moyens pour les soutenir. Mais l'on peut faire beaucoup avec de meilleures données sur le genre dans le commerce. Ce n'est que le début de notre voyage, et nous sommes impatients de développer ce travail en consultation et en engagement avec vous et les parties prenantes concernées.

Je vous remercie de votre attention.