Un nouveau rapport de la CNUCED examine le potentiel économique, environnemental et social de la plante.
Le chanvre est une plante surprenante. Elle requiert une fraction de l’eau nécessaire pour cultiver du coton, chacune de ses composantes est utile et absorbe plus de dioxyde de carbone par hectare que les autres cultures et la plupart des arbres.
Cultivée depuis des milliers d’années, cette plante respectueuse de l’environnement peut entrer dans la fabrication de produits alimentaires, de biocarburants, de textiles, et même de matériaux de construction.
Avec une meilleure sensibilisation sur les avantages du chanvre, son marché mondial pourrait atteindre 18,6 milliards de dollars en 2027 – presque quatre fois le montant atteint en 2020, selon un rapport de la CNUCED.
« Le marché en croissance du chanvre présente des opportunités économiques significatives sur lesquelles tous les pays peuvent capitaliser, » dit Marco Fugazza, économiste à la CNUCED et auteur de ce rapport.
« Ce produit étant renouvelable, les opportunités qu’il offre sont durables. C’est extrêmement important alors que les pays tentent de renforcer leurs économies tout en protégeant l’environnement, » dit-il.
Le rapport, « Coup d’œil sur les produits de base : Edition spéciale sur le chanvre industriel », souligne un potentiel commercial inexploité.
Une quarantaine de pays ont produit près de 275 000 tonnes de chanvre industriel brut ou semi-transformé en 2019, selon les données statistiques les plus récentes. Cependant, plus de la moitié de la production mondiale provient de quatre pays seulement. La Chine est en tête, suivie par la France, le Canada et les Etats-Unis.
Préciser le statut juridique du chanvre
Aujourd’hui, la plupart des produits issus du chanvre sont achetés localement. Les exportations et importations mondiales représentent seulement 42 millions de dollars, offrant donc d’importantes opportunités de croissance.
La faiblesse de ce montant s’explique en partie du fait que les statistiques officielles ne couvrent qu’un étroit panel de produits à base de chanvre. Une autre raison concerne le stigmate attaché au chanvre celui-ci appartenant à la même famille que le cannabis.
Bien que le chanvre industriel n’ait aucune propriété toxique, le manque de clarté juridique signifie qu’il reste une plante controversée dans de nombreux pays.
La production de chanvre a été interdite aux Etats-Unis en 1937 sous le Marihuana Tax Act, pour redevenir légale seulement en 2018.
Afin de minimiser les risques liés au chanvre et d’en maximiser le potentiel pour les pays et les producteurs, le rapport invite les gouvernements à préciser son statut juridique de produit non-toxique.
Planter les graines du développement
Le marché en croissance du chanvre industriel ouvre des opportunités économiques pour les pays en développement.
« Grâce à son adaptabilité et ses caractéristiques fonctionnelles, le marché du chanvre industriel représente un vaste potentiel pour l’agriculture, le textile, le recyclage, l’automobile, le mobilier, la nourriture et la boisson, le papier, les matériaux de construction et les produits de soins personnels, » constate le rapport.
Le chanvre peut pousser sous une grande variété de climats dans la plupart des régions du monde. Il peut être planté sur des terres inadaptées à d’autres cultures et aide à restaurer la qualité des sols en éliminant métaux lourds et autres contaminants.
Il est aussi bénéfique lorsqu’inclus dans la rotation des cultures. Le rapport mentionne, par exemple, que la culture du chanvre mène à une augmentation de 10 à 20 % du rendement du blé.
Toutes les parties de la plante – racines, fleurs, fruit, tiges et feuilles – pouvant être utilisées, la culture du chanvre engendre bien moins de gaspillage et de pollution que les autres productions agricoles dont les déchets peuvent avoir une empreinte écologique importante.
En Afrique, 80 % ou plus de la masse totale du cotonnier est brûlée ou jetée, générant une forte pollution. En Inde, des fumées asphyxiantes étouffent des régions entières du pays chaque automne lorsque les agriculteurs brûlent les champs de coton pour défricher les restes de la récolte. Certains jours, les feux agricoles participent à près de la moitié de la pollution mortelle de Delhi.
En exploitant toutes les parties du chanvre, les pays en développement pourraient construire des chaînes de production durables qui contribuent à la croissance dans les zones rurales et renforcent la diversification économique.
« La culture du chanvre peut aider à maximiser l’utilisation des terres et contribuer aussi à l’augmentation des revenus des agriculteurs et des communautés rurales, » remarque le rapport.
Ce qu’il faut faire pour en récolter les fruits
Afin d’aider les pays à exploiter les avantages économiques et environnementaux du chanvre industriel, la CNUCED recommande :
- À chaque pays de clarifier le statut juridique du chanvre en le distinguant du cannabis
- Aux gouvernements et aux industries de mieux évaluer comment les règles sur les marchés extérieurs pourraient restreindre leurs potentiels d’exportation
- Aux pays en développement de promouvoir la coopération régionale pour établir des chaînes de valeur viables et durables pour le chanvre basées sur l’exploitation de la plante dans toutes ses parties
- Dans la plupart des cas, aux pays en développement de baser leurs plans sur un réseau local d’agriculteurs et d’entreprises qui puisse fournir du chanvre brut et des services de traitement primaire
- Aux pays de définir et d’adopter des normes de qualité afin de faciliter l’accès aux marchés mondiaux et de promouvoir également des produits de qualité pour les marchés domestiques
- Afin de collecter des statistiques commerciales plus précises, aux parties prenantes d’inclure un panel plus représentatif des produits liés au chanvre dans les classifications internationales, en priorité les graines et les huiles.
« De culture facile et dotée d’un vaste potentiel environnemental et économique, la culture du chanvre industriel se présente comme un moyen de nourrir la croissance des chaînes de valeur durables sur les marchés locaux et régionaux pour de nombreux pays en développement, » souligne le rapport de la CNUCED.
