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Les pays les plus pauvres du monde devraient jouer un rôle de premier plan et orienter l'aide extérieure vers leurs priorités de développement


Communiqué de presse
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UNCTAD/PRESS/PR/2019/038
Les pays les plus pauvres du monde devraient jouer un rôle de premier plan et orienter l'aide extérieure vers leurs priorités de développement

Geneva, Suisse, 19 novembre 2019

Les pays les plus pauvres devraient utiliser l'aide extérieure pour transformer la structure de leur économie

Les donateurs devraient aligner leur soutien sur les plans de développement nationaux des pays les plus pauvres

Les pays les moins avancés (PMA), nations les plus pauvres du monde, devraient veiller à ce que les financements extérieurs, toutes sources confondues, soient dédiés aux priorités de leur développement national. Cette approche est le meilleur moyen de gérer leur dépendance à l'égard de l'aide et finalement d’y échapper, selon le Rapport 2019 sur les pays les moins avancés, publié par la CNUCED.

Selon le rapport, les PMA représentent 15 des 20 pays les plus dépendants de l'aide dans le monde en raison, entre autres facteurs, des déficits persistants de leur épargne intérieure.

"Pour atteindre les objectifs de développement durable et échapper à la dépendance à l'égard de l'aide, les PMA ont besoin d'un financement extérieur axé sur la transformation structurelle de leur économie", a déclaré Mukhisa Kituyi, Secrétaire général de la CNUCED.

Pour ce faire, les PMA devraient s'approprier leur programme de développement et gérer l'allocation du financement extérieur du développement conformément à leurs priorités nationales de développement. La communauté internationale doit également renforcer son soutien à la réalisation de cet objectif commun, affirme le rapport.

Il appelle à un "Programme 2.0 sur l'efficacité de l'aide" pour revitaliser le programme sur l'efficacité de l'aide tel que figurant dans la Déclaration de Paris adopté en 2005 sur la qualité de l'aide et de son impact sur le développement. Les PMA devraient être en mesure de s'adapter à un cadre de l'aide et du financement du développement considérablement modifié.

Plus de sources extérieures, peu de financement du développement

Les pays en développement ont accès à une nouvelle architecture de l'aide, avec un plus large éventail de sources de financement extérieures. Mais cette situation a entraîné une complexité et une opacité accrues pour les pays les plus pauvres, souligne le rapport.

En outre, cette diversité de financement ne s'est pas traduite par des augmentations significatives du financement du développement provenant de toutes les sources. Elle a plutôt vu croître  le nombre d'acteurs et d'instruments.

Les décaissements d'aide publique au développement (APD) en faveur des PMA n'ont augmenté que de 2 % par an depuis le Programme d'action d'Istanbul adopté en  2011 et restent loin des objectifs convenus au niveau international, observe le rapport.

"Les liens entre le financement extérieur du développement et les priorités nationales de développement s'affaiblissent ", a déclaré Rolf Traeger, chef de la section PMA de la CNUCED.

La composition sectorielle de l'APD continue d'être biaisée en faveur des secteurs sociaux, qui absorbent 45 % de l'aide totale, alors que les secteurs de l'infrastructure économique et de production ne reçoivent respectivement que 14 % et 8 %.

Le financement du développement moderne se caractérise également par un nombre croissant d'instruments complexes et une diminution de la concessionnalité (part du financement obtenu à des taux bonifiés).

Le résultat est que les PMA ont de plus en plus eu recours au financement par l'emprunt, faisant plus que doubler l'encours de leur dette extérieure, qui est passé de 146 milliards de dollars à 313 milliards entre 2007 et 2017. Actuellement, un tiers des PMA sont en situation de surendettement ou courent un risque élevé de surendettement.

"Cela menace la viabilité de l’endettement et le potentiel de développement économique. Ces tendances affaiblissent encore davantage les capacités limitées de l'État dans les PMA ", a déclaré M. Traeger.

Les PMA devraient mieux gérer le financement du développement

Pour inverser la tendance, le rapport exhorte les PMA à renforcer la gestion de leur financement du développement. Cela pourrait se faire en établissant ou en renforçant les mécanismes de coordination de l'aide, comme l'ont montré certains PMA, par exemple le Rwanda et la République démocratique populaire lao.

Les PMA devraient adopter des politiques pour gérer convenablement leurs relations avec les acteurs du développement traditionnels et émergents, notamment les donateurs traditionnels, les organisations non gouvernementales (ONG), les philanthropes, les entités du secteur privé participant à la coopération au développement et les sources de financement du développement provenant d’autres pays en développement.

En outre, le rapport recommande que les PMA clarifient la prise de décisions concernant l'allocation des ressources financières, la sélection des projets et la détermination des domaines et des questions prioritaires. Ils devraient concevoir des mécanismes pour le décaissement, l'allocation et l'utilisation efficaces des financements extérieurs afin de préserver leur marge de manœuvre budgétaire.

En outre, les PMA devraient se concerter avec les sources de financement pour aligner les programmes, projets et activités financés sur les plans et priorités nationaux de développement, et faire respecter la responsabilité mutuelle dans les pratiques, la collecte de données, l'établissement de rapports, les normes de transparence et de suivi.

Les PMA doivent renforcer les capacités de l'État

Les PMA devraient également renforcer la capacité de l'État à canaliser les ressources vers la transformation structurelle. Ils devraient mobiliser et gérer efficacement les finances intérieures pour élargir la marge de manœuvre budgétaire, assurer les capacités humaines et institutionnelles nécessaires et créer des synergies entre l'aide et la mobilisation des ressources intérieures.

Selon le rapport, les PMA doivent mobiliser et allouer les fonds nécessaires à l'investissement à long terme dans de nouveaux secteurs et activités productifs, ainsi qu'aux investissements entrepris pour la modernisation technologique et organisationnelle des secteurs et unités de production existants.

Ils devraient également mettre en place et renforcer les institutions nécessaires pour entreprendre l'analyse, la planification et la coordination financières en vue de la transformation structurelle, ainsi que celles chargées de la mobilisation des ressources financières intérieures.

En outre, les PMA devraient procéder aux réformes des politiques nécessaires pour élargir l'assiette fiscale et accroître les recettes, par exemple en examinant les faibles taux d'imposition dans les secteurs des ressources naturelles (en particulier l'exploitation minière) et en éliminant les échappatoires fiscales et les exemptions inutiles.

Programme 2.0 pour l’efficacité de l'aide

Appelant à un "Programme 2.0 sur l'efficacité de l'aide", la CNUCED préconise la revitalisation du programme traditionnel sur l'efficacité de l'aide.

Le rapport indique que les donateurs traditionnels doivent respecter les engagements existants visant à consacrer entre 0,15 % et 0,2 % de leur revenu national brut à l'APD en faveur des PMA, contre seulement 0,09 % actuellement. Ces engagements ont été réaffirmés par les objectifs de développement durable adoptés par tous les pays en 2015.

En outre, les donateurs doivent s'aligner sur les priorités des pays bénéficiaires en orientant leurs allocations d'aide en fonction des plans de développement nationaux des PMA et en utilisant les systèmes nationaux existants.

Le rapport appelle à l'élimination des pratiques qui affaiblissent l'État, telles que la création d'unités de mise en œuvre indépendantes par les donateurs et des procédures de responsabilisation qui ne relèvent pas des structures de l'État bénéficiaire. Ces actions épuisent souvent les ressources humaines nationales ou contournent complètement les gouvernements nationaux, privant souvent l'État de tout pouvoir par une intervention directe au niveau local.

Les donateurs devraient également accroître la transparence dans la sélection et la mise en œuvre des projets et établir des cadres d'évaluation de l'impact sur le développement convenu au niveau international pour mesurer l'impact des acteurs non étatiques sur le développement. Ils devraient veiller à ce que l'appui au secteur privé crée des synergies avec le développement de la base entrepreneuriale nationale des PMA.

Le rapport indique que l'émergence de nouveaux acteurs dans l'espace de coopération au développement et des sources de financement actuelles, y compris le secteur privé, les organisations philanthropiques et les ONG, nécessite l'examen et l'adaptation d'approches plus traditionnelles.

Des actions internationales audacieuses s'imposent

La CNUCED exhorte la communauté internationale à prendre des mesures aux niveaux bilatéral et multilatéral pour renforcer les mesures prises par les PMA au niveau national et à s'attaquer aux problèmes systémiques de l'architecture financière internationale qui affectent leur accès au financement du développement.

Ces mesures comprendraient davantage de programmes de coopération Sud-Sud et de programmes de coopération triangulaire.

La communauté internationale devrait également contribuer au renforcement de l'État dans les PMA en proposant des programmes de renforcement des capacités et de formation, notamment en matière de planification du développement, d'analyse financière et de compréhension de l’architecture changeante de l’aide.

La communauté internationale devrait donner la priorité à une représentation et à une voix adéquates des PMA dans les forums sur l'aide et le financement du développement afin que leurs préoccupations et intérêts spécifiques soient pris en compte. Ceci est particulièrement vrai lorsqu'il est question d'un mécanisme multilatéral de restructuration de la dette, de flux financiers illicites, de liquidité internationale ou de financement lié au climat.

Ceci implique de rétablir la primauté du multilatéralisme en tant que premier moyen de faire entendre et de prendre en compte la voix et les préoccupations des PMA, explique le rapport.